Le troisième mandat que le président Pierre Nkurunziza veut
briguer en 2015 en violation de la Constitution sème des troubles. Cette volonté de s'accrocher au pouvoir est devenu le synthome d'un autoritarisme rampant. Un diplomate a dit récemment au très sérieux journal anglais The Economist que le pouvoir de Bujumbura a transformé le Burundi en un « hybride
de l’autoritarisme politique rwandais et du désastre économique congolais ».
Cela amène l’opposition à se demander comment se comporter face à cette situation. Faut-il continuer à dépenser les énergies en dénonçant ce troisième mandat du président ou alors se préparer
à le mettre à la porte par le vote, comme le firent les Sénégalais a l’endroit
du vieux Abdoulaye Wade en 2012 ? Un
lecteur, Jean-Claude Gatete, analyse la difficulté de l’option sénégalaise au
Burundi :
« L’opposition burundaise devrait commencer à se préparer pour 2015 comme si la candidature du Président Nkurunziza était déjà actée. Mais pour cela, il faut un leader naturel de cette opposition qui peine visiblement à se rassembler autour d'un même projet. Le pouvoir ne se trompe pas, j'ai comme impression qu'il a plus peur de la société civile que de l'opposition, à mon avis, pour une raison simple: La société civile, contrairement à l'opposition extra-parlementaire s'est trouvée depuis des années un leader naturel et charismatique en la personne de Pacifique Nininahazwe. C'est pour cela que le même Ministre de l'Intérieur ne cesse de s'attaquer beaucoup plus à lui qu'aux leaders de l'opposition. Pour que celle-ci s'inspire du Sénégal donc, il lui faudra trouver ce leader qui lui manque, un leader capable de prendre des coups et de les encaisser, un leader aux épaules suffisamment larges pour supporter le lourd poids d'être le challenger d'un Président qui n'aura rien ménagé pour se présenter à un mandat qui lui est interdit! »
Jean Claude Gatete a vu juste. Mais puisqu’on parle du
Sénégal, il faut se souvenir que, avant d’être le "leader naturel" de
l'opposition, Macky Sall était le bras droit du vieux Abdoulaye Wade. Il a été
son premier ministre. Il a été le président d'une Assemblée nationale
majoritairement wadiste. Suite aux désaccords avec Wade, il décide en 2008 de
quitter le Parti Démocratique Sénégalais pour créer un autre parti, l'Alliance
de la République. Pour dire que le
changement sénégalais est venu de la transformation des rapports de force a
l’intérieur du "Système', comme on dit.
Le changement au Burundi peut donc venir d’une opposition bien organisée, comme
le souligne Gatete en haut, mais aussi il peut venir de la transformation
des rapports de force à l’intérieur du système DD. Maintenant, ce sont les
« Généraux » qui mènent la danse. Mais il y a aussi dans le parti au
pouvoir une masse d’intellectuels frustrés, les civils, ceux qui ne sont pas
écoutés puisqu’ils n’ont pas pris les armes. C’est de ceux la aussi que viendra
le changement, le jour où ils en auront marre d’être des « DD de seconde
zone » et décideront de s’émanciper de la dictature des Généraux. Mais ca,
ce n’est pas en 2015.