vendredi 13 décembre 2013

« Le Burundi pratiquait un système qui ressemblait à l’Apartheid »




Le Burundi a-t-il collaboré avec le régime de l’Apartheid, que Nelson Mandela a combattu toute sa vie ? Fabien Cishahayo est scandalisé en tous cas par l’hypocrisie qui entoure les éloges des Burundais à notre ancien médiateur :   


"Mandela a croisé notre route vers la paix en 2000. Et il a radicalement changé la donne des négociations qui ont mené à la paix, consacrée par l’accord d’Arusha signé la même année. Quand le grand homme était en prison, notre pays pratiquait alors un système qui ressemblait étrangement à celui pratiqué en Afrique du Sud. Et mon pays commerçait allègrement avec le pays qui avait envoyé Mandela derrière les barreaux, condamné « à perpétuité plus cinq ans ». Ces échanges commerciaux indignes d’une nation sensible au sort des damnés de la terre sud-africaine, j’en ai eu connaissance parce qu’un ami qui travaillait chez Dimitri, la célèbre épicerie de Bujumbura, me disait constamment qu’ils allaient réceptionner des marchandises venant d’Afrique du Sud à l’aéroport. Un autre ami a fait partie d’une mission commerciale de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burundi. Un autre enfin, dans nos échanges sur le réseau Facebook, m’a avoué qu’il était parti en mission en Afrique du Sud, avec un visa estampé « temporarly white », (temporairement blanc), pour lui permettre de fréquenter des lieux exclusivement réservés aux Blancs, et d’interagir avec des Blancs pendant sa mission. Et pendant ce temps, une résidence universitaire s’appelait Soweto ; on jouait une pièce de théâtre intitulée "Soweto ou le cri de l’espoir" (un clin d’œil pour corriger l’Apartheid local ? J’en doute personnellement !) et au sein du même establishment politique qui commerçait avec un système honni du monde entier, des groupes se battaient prétendument pour la fin de l’Apartheid. Certains de ces militants – dont un professeur d’université bien connu, spécialiste en relations internationales - se voyaient déjà diplomates dans la représentation diplomatique du Burundi en Afrique du Sud post-Apartheid. C’est la raison pour laquelle, entendant le brouhaha des hommages rendus à Mandela, je dis que l’hypocrisie des Burundais me tue !"


A la fin il ajoute :

"Au lieu de ce concert d’éloges, nous devrions organiser des journées de réflexion sur l’héritage qu’il a laissé au Burundais et sur sa contribution à notre sortie du tunnel, pour ancrer résolument notre pays dans la voie de la démocratie. Ce rappel de l’apport de Mandela à notre histoire devrait nous réconcilier, opposition et coalition au pouvoir, société civile, communautés religieuses, instruits et simples citoyens, pour redessiner la route du futur du Burundi".


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