Depuis que le Cndd-Fdd a
lancé une offensive nyakurisatrice contre le parti Uprona, par truchement de
quelques Upronistes interposés, une tension politico-sécuritaire s’installe
progressivement au Burundi. L’offensive médiatique du Cndd-Fdd des deux
dernières semaines a beau essayé de nous convaincre qu’il ne s’agit ni moins ni
plus que d’un conflit intra-Upronistes, mais les faits qui s’observent sur
terrain ne se joignent pas aux belles paroles. Il y a presque trois semaines,
j’écrivais des conséquences
potentielles du limogeage du Major Bernard Busokoza. Mon but était
d’avertir pour que tout chemin qui peut nous ramener à la violence soit exclu
des jeux des uns et des autres. Mais voilà qu’ hélas, nous semblons nous
diriger droitement vers un mur. Un mur de violence en ce moment que le contrat
social signé à Arusha se fissure du jour au lendemain.
Quand les Burundais se
sont rencontrés à Arusha, ils se faisaient représenter par divers groupes. Les
plus connus de ces groupes sont le G7 et le G10. Le G7 était un groupe de
partis politiques à prédominance Hutu tandis que le G10 était de ceux à prédominance
Tutsi. Quoi qu’il y avait des Tutsi au
sein du G7 et des Hutu au sein du G10, la compréhension générale était que le
G7 représentait les intérêts Hutu dans les négociations tandis que le G10 était
à la table pour s’assurer que les intérêts Tutsi ne soient pas oubliés. C’est
ainsi que les postes politiques de la transition furent partagés entre
représentants du G7 et du G10 pour encore une fois s’assurer que les intérêts
des uns et des autres soient garantis afin de réussir la marche vers un Burundi
paisible et réconcilié.
Quatorze ans après la
signature des Accords d’Arusha, cette configuration G7 et G10 explique
l’évolution politico-ethnique et sécuritaire de la crise institutionnelle de
2014. Abordons le sujet sans faux-fuyants et sans nous voiler la face.
Quoi qu’il y avait déjà des
grondements à caractère ethnique ici et là; jusqu’à récemment, le problème
burundais se décrivait en termes de mauvaise gouvernance politico-économique.
Aussi longtemps que Hutu et Tutsi se sentaient pleinement représentés dans les
institutions de la république selon les
prescrits d’Arusha, la responsabilité dans cette mauvaise gouvernance étaient également
pleinement partagée. En outre, aussi longtemps que les partis politiques à prédominance
Hutu se Nyakurisaient entre eux et que les Upronistes – du seul parti politique
à prédominance Tutsi au gouvernement – s’entredéchiraient en interne, l’équilibre
politico-ethnique d’Arusha n’était guerre en danger et les acquis des uns et
des autres – ethniquement parlant – n’étaient pas menacés. Tout changea le moment que le Cndd-Fdd
changea son fusil d’épaule pour enfin placer l’Uprona dans son collimateur, après
que le parti des Badasigana eut refusé de coopérer sur des questions cruciales telles
que la CNTB, la révision de la Constitution, et le troisième mandat de
Nkurunziza. Des questions tellement cruciales qu’elles commençaient même à
rapprocher les deux ailes de l’Uprona antérieurement antagonistes.
Mais tiens, tous les
Tutsis ne sont pas des Upronistes et tous les Upronistes ne sont pas des
Tutsis. Effectivement, oui. Néanmoins, le mauvais calcul que le Cndd-Fdd a fait
a été de ne pas constater avant l’offensive nyakurisatrice contre l’Uprona – le
seul parti Tutsi au gouvernement – que cette attaque revenait automatiquement à
attaquer les garants des Accords d’Arusha -- côté Tutsi -- et à fragiliser l’équilibre
politico-ethnique consacré par Arusha. L’effet de l’offensive «Cénédédique »
a été une coaliton progressive des Tutsis (Upronistes ou pas) autour de
l’Uprona. Il est à parier que l’uprona a aujourd’hui la plus haute note
favorable des Tutsi des huit dernières années. C’est comme un instinct de
survie. Parler à vos confidents amis Tutsis, vous le comprendrez.
Mais quid de Prosper
Bazombanza et compagnie ? De même que les Tutsi du G7 à Arusha n’auraient
pas pu prétendre défendre de façon crédible les intérêts Tutsi avec la même
ferveur que ceux du G10, Bazombanza et compagnie (qui ont dû louer des acteurs
pseudo-Upronistes pour remplir une salle) ne peuvent pas prétendre représenter crédiblement
les Tutsis et ne sont perçus que comme des Tutsis du G7-version 2014. Les
Tutsis ne se reconnaissent pas en eux. Certains Tutsis (pas nécessairement et/ou
exclusivement des Upronistes) les considèrent même comme des «traitres». Et en
ceci se trouve le nœud du problème de la crise politico-ethnique de 2014.
Est-ce que le Cndd-Fdd va foncer dans son entêtement avec un gouvernement sans représentation
Tutsi crédible ?
C’est dans cet atmosphère
que se murmure des tensions au sein des forces de défense et de sécurité. Que
se parlent des officiers ex-FAB qui
n’ont pas répondu présents aux invitations à la fête de l’Unité Nationale du 5
Février dernier. Des sessions de causerie morale où des officiers d’une des composantes
de la FDN ne sont plus même intéressés à poser des questions. Sans oublier
l’alerte maximum qui règne dans les camps militaires de la capitale. Des
informations à vérifier minutieusement, certes; mais des informations qui
intoxiquent l’atmosphère politico-ethnique Burundais sans doute.
Ce qui est déplorable
dans toute cette histoire, c’est que nous ne devrions pas nous retrouver sur
cette pente glissante que nous empruntons dernièrement. L’Uprona n’est pas en
direct compétition avec le Cndd-Fdd en ce qui est de leurs électorats respectifs. Ces partenaires gouvernementaux devraient,
selon les prescrits d’Arusha, pouvoir cohabiter pacifiquement. Il n’est jamais
trop tard pour bien faire dit-on. Le pays peut éviter les violences et les
bains de sang qui se profilent à l’horizon. Le camp Nkurunziza n’a qu’à appeler
Nditije et ainsi restaurer l’équilibre «Arushéen». Nous autres citoyens lambda
aimerions retourner à nous plaindre de la mauvaise gouvernance politico-économique
du Burundi par le couple Uprona-Cndd-Fdd (ce couple qui nous représente tous,
dans notre diversité ethnique).
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