samedi 3 août 2013

Do Burundians Suffer From Cognitive Dissonance?

It is one of the questions that Thierry Uwamahoro asked in his previous blog post. A reader answers:

This cognitive dissonance is interesting. Sounds simple enough. The people are miserable but they do not blame Nkurunziza ( and y'all know he WILL run again) for their misery. The people were never taught to demand and expect better from their leaders, because very few have actually cared about their welfare. They were poor before Nkurunziza, they are poor with him and they will most likely be poor after him. The difference is that he's managed to connect with them, make them believe that he cares and make them feel relatively safe in a manner that no other leader ( kiretse maybe Rwagasore or Ndadaye) has done. It's a very powerful tool.

Another: 

People do well not to blame their miser on NKURUZIZA. They do not suffer from any cognitive disorder. The current President of the country is not the cause of the misery but the solution. He is trying all he can to get the people out of the tremendous misery that resulted from the deliberate actions of UPRONA. That is the party that deliberately impoverished people, wanted them poor, miserable, hungry, thirsty, ignorant so that it can control them easily. What a miscalculation! It is a miscalculation because had UPRONA promoted education for all as NKURUNZIZA is doing at the moment, sought to innovate and increase public infrastructure, Burundi would be one of the strongest nation in the world today, every burundian would be profiting out of this, including the same UPRONA members who miscalculated.

jeudi 1 août 2013

Le Paradoxe Burundais : La Popularité du CNDD-FDD

Par Thierry Uwamahoro

Thierry Uwamahoro
Quelques mois avant les élections de 2010, il se lisait sur pas mal de sites internet que l’opposition burundaise ne pouvait s’attendre qu’à une victoire écrasante. Tellement il y avait eu une médiatisation de la corruption, des malversations économiques, des violations de droits humains, d’injustice, de gouvernance médiocre…le seul choix digne que le peuple pouvait s’offrir était de balayer le régime Cndd-Fdd et d’introniser quelqu’un (n’ importe qui) de l’opposition; se disaient pas mal de (pseudo)-analystes politiques. Certains avaient même avancé (inventé ?) des sondages commandités par les services de renseignement qui donnaient Nkurunziza perdant avec un score médiocre. Le 24 mai 2010 fut d’une telle surprise (un paradoxe pour pas mal de gens) que la seule explication possible était l’existence d’un hold-up électoral. La suite se retrouve dans les annales historiques du Burundi. Que peut-on apprendre de 2010 pour prédire 2015 ?

Mi-chemin vers les élections de 2015, on lit dans certains journaux, on entend dans certaines radios, et nos amis (pour ceux qui sont loin du pays) nous informent que la pauvreté et la faim font rage, que les taxes Nkurunziza ne sont qu’ une goutte qui va déborder la vase, que l’ insécurité règne, que la corruption est devenue le mot d’ ordre,  que les soins de santé sont devenus plus nauséabonds que les couloirs des hôpitaux publics eux-mêmes, que le paysannat est prêt à arracher les caféiers…qu’ enfin, la marmite bouillit et le couvercle va s’ envoler à n’ importe quelle heure.

Effectivement, comme en 2010, il devient incompréhensible que le Cndd-Fdd puisse être populaire dans de telles conditions. Mais, comme en 2010 effectivement, il n’existe pas de sondages scientifiques fréquemment conduits au Burundi pour nous informer de l’humeur général de la population burundaise, au-delà de nos cercles d’amis et sources préférées (biaisées ?) d’information. Le seul et unique sondage d’opinion scientifiquement crédible depuis le début de la deuxième législature de Nkurunziza est celui produit en début 2013 par GRADIS (Groupe de Recherche et d’Appui au Développement des Initiatives Démocratiques) en collaboration avec l’université de État du Michigan aux États-Unis et celle du Capetown en Afrique du Sud et en partenariat avec le réseau Afrobaromètre. Quoique reconnaissant les limites d’un sondage unique, que présage-t-il?

Avec une erreur de plus ou moins 3%, les intentions de vote pour 2015 s’énoncent comme suit;  Cndd-Fdd: 54%, opposition: 13%,  indécis/réticents/silencieux : 32%. A cela il faut ajouter que le même sondage place la popularité du président Nkurunziza à 65% en milieu rural, 40% dans la ville de Bujumbura, et 61% au niveau national. Curieusement, ABP Info note que le sondage de GRADIS révèle que 53% de Burundais interrogés sont assez pessimistes sur les conditions économiques du pays et pensent qu’elles sont mauvaises. 54% pensent que leurs conditions de vie sont mauvaises ou très mauvaises. 65% des personnes interrogées ont indiqué qu’ils ne mangent pas à leur faim. Que dire de ces statistiques ? Plein. Notons quelques points saillants.
Le Cndd-Fdd et surtout le président Nkurunziza restent populaires quoique nous dise une certaine opinion. Néanmoins, l’opposition (que je trouve vaguement définie d’ailleurs) ne devrait pas pour autant déchanter. L’électorat burundais n’est pas aussi déséquilibré en faveur du parti au pouvoir comme aimeraient nous le faire croire les adeptes de l’aigle noir. Quand 32% se réclament indécis ou réticents, c’est que leurs cœurs ne battent pas/plus réellement pour le Cndd-Fdd. C’est qu’ils sont en quelques sortes déçus. En ajoutant ces 32% au 13% qui se sont déjà déclarés pour l’opposition, nous retrouvons un électorat qui est divisé 54-45 pour et contre le Cndd-Fdd (à conditions que l’opposition se positionne en alternative sure contre le Cndd-Fdd). Deux ans avant 2015, les dés ne sont pas encore jetés. Nkurunziza pourrait gagner la présidence, mais le sénat et l’assemblée nationale ont plus de chances de ne pas se retrouver monocolores en 2015 à l’instar de leurs versions actuelles.

Mais, paradoxe ! Comment se fait-il que 54% de burundais jugent leurs conditions de vie très mauvaises mais un pourcentage équivalent se dit prêt à reconduire l’équipe Nkurunziza aux affaires ? Comment se fait-il que 65% de burundais disent qu’ils ont faim, mais maintiennent Nkurunziza comme leur leader préféré ? Comment se fait-il que la majorité de burundais juge les performances gouvernementales pour faire face aux différents problèmes économiques de mauvaises (selon ABP) mais préfèrent la même équipe jusqu’en 2020 ? Est-ce parce que les burundais souffrent d’une dissonance cognitive ? Est-ce parce que l’opposition burundaise n’est pas performante et ne se présente pas réellement comme une alternative crédible ? Est-ce que ces pourcentages changeront maintenant que l’ADC a annoncé qu’elle va lancer une plate-forme ouverte à toutes les forces vives de la nation qui va se concentrer à trouver des solutions aux défis socio-économiques qui minent notre nation? Voilà, plein de pistes à exploiter. Mais, dans l’entre temps, une possible explication…

Enfoui dans les résultats du sondage GRADIS se trouve une statistique qui vaut une dizaine de milliers de mots. Sur la question ultra-cruciale de sécurité, 80% (quatre-vingt pourcent) de Burundais affirment que le niveau de sécurité est satisfaisant. Rappelez-vous qu’il y a moins d’une décennie, nous considérions (avec blagues mais non moins sérieux) que notre espérance de vie était de 24 heures renouvelables. De là à 80% de burundais qui affirment être en état de sécurité satisfaisant, c’est un pas géant. Un pas qui expliquerait le paradoxe qu’est la popularité du Cndd-Fdd; quoique ce pas géant ne devrait pas être crédité uniquement au parti au pouvoir.  D’ici 2015, la tache énorme de ceux qui veulent détrôner Nkurunziza sera d’amener un peuple affamé à faire une analyse contrefactuelle en ce qui est de la question sécurité. Une analyse contrefactuelle n’est jamais facile.


Note : puisque le rapport de GRADIS n’est pas disponible en ligne, les données présentées se basent sur un découpage des résultats du sondage d’opinion comme rapporté ici, ici, ici, et ici.