jeudi 19 décembre 2013

Quand Le Mal Burundais Est Sucré



par Thierry Uwamahoro

Audace Bukuru. Source de la Photo Jeune Afrique
Audace Bukuru inspire. Il devient rapidement la  référence pour un leadership qui commençait à se rendre rare. Leader, bon gestionnaire ferme, certains doutent même de ses exploits— tellement ils sont presque miraculeux. L’entreprise dont il hérite la gestion en 2010 croulait sous «5 millions d'euros de dettes et plus de 18 millions d'euros d'arriérés».  Une année après, la Sosumo a «apuré toutes ses dettes et a, en outre, versé 50 milliards de francs burundais (environ 28,2 millions d'euros) d'impôts et taxes au Trésor public... Ses bénéfices nets atteignent 2,23 milliards de francs burundais en 2011 (contre 638 millions en 2010, soit une hausse de 250 %), un record depuis la création de la société, en 1982», selon Jeune Afrique[i].

Curieusement, l’homme qui a orchestré cette réussite presque miraculeuse doit se retrouver sous protection policière. Sa vie est en danger. Il est menacé par des membres du gouvernement Nkurunziza et quelques hauts cadres de la république. Motif ? Mr. Bukuru, dans ses plans de redressement de la Sosumo, a eu l’audace de supprimer «la tradition des sacs de sucre offerts, chaque mois, aux membres du gouvernement et à quelques autres personnalités», nous rapporte Jeune Afrique. 

Cette décision de supprimer des sacs de sucre traditionnellement cédés gratuitement aux membres du gouvernement sera «lourde de conséquences». Audace Bukuru recevra des intimidations et des menaces.  «Aujourd'hui, des gardes sont commis à sa sécurité », renchérit Jeune Afrique. Mr. Bukuru a pu tenir, dit-il, grâce au soutien du président de la république. Une bonne chose ! Mais aussi un paradoxe car Mr. Bukuru s’était retrouvé sous le harcèlement (si pas le terrorisme) des ministres de Nkurunziza.  Un harcèlement qui doit avoir été jugé très sérieux pour que notre ADG se retrouve sous garde rapprochée des forces de sécurité.

Mais qui sont ces personnes, ces membres du gouvernement, ces quelques personnalités de notre république qui constituent cet axe du mal qui va jusqu’à mettre la vie d’un ADG en danger pour une question de quelques sacs de sucre ? Existe-t-il un groupe de puissants, bien payés, bien lotis, bien nourris, bien logés…bagipfukamyemunda ?

Pour la petite histoire, l’Honorable Gabriel Ntisezerana (CNDD-FDD), deuxième vice-président de la république sous le premier mandat de Nkurunziza (2005 à 2010) et président du Senat sous le deuxième mandat  clamait haut et fort que la Sosumo se portait à merveille, en contradiction au ministre du commerce de l’époque, Euphrasie Bigirimana (Frodebu), qui elle affirmait que la santé de cette entreprise était déplorable[ii]. L’honorable Ntisezerana qui est resté cité comme fournisseur d’engrais inefficace mais excessivement cher à la Sosumo, avait probablement des intérêts personnels à protéger aux dépends de l’intérêt national. Il faudra y revenir en ce moment que l’on veut faire passer coûte que coûte un projet de constitution qui autorise au chef de l’Etat burundais de faire des affaires privées lucratives durant l’exercice de son mandat présidentiel.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire