dimanche 10 février 2013

L’ombre de la répression plane sur les associations de la société civile



Depuis que les partis politiques de l’opposition ont “démissionné” suite aux élections de 2010, les activistes réunis dans les associations de la société civile sont devenus plus visibles, trop visibles aux yeux du pouvoir. Ne convoitant pas le pouvoir, ils ont jusqu'ici été relativement tolérés et ne ratent aucune occasion de dénoncer ce qui ne va pas ou qui va mal, de la corruption aux assassinats politiques. Mais cette voix alternative est devenue insupportable, incontrôlable, indocile. Ils parlent trop ces activistes, mais nos dirigeants détestent des voix discordantes. Et le grand problème, c’est qu’ils sont perçus comme des partenaires sérieux par les ONG internationales et autres bailleurs de fonds qui dans certains domaines préfèrent faire confiance aux associations plus qu’au gouvernement étant donné que celui-ci est à plusieurs égards gangrenés par la corruption. Ces organisations semblent donc devenues le principal concurrent du gouvernement. Le moment semble donc venu de les faire taire.

Le ton a été donné par le ministre de l’Intérieur Edouard Nduwimana lors d’une rencontre entre ce dernier et les représentants de ces ONG ce vendredi 08 février. Ce ministre et certains partis ont décidé que les associations se mêlent trop des affaires politiques et qu’ils risquent de déstabiliser les élections de 2015. Sur quelle base repose cette accusation, personne ne sait. A ce que je sache, ce ne sont pas les associations qui ont mis Hussein Radjabu en prison ou poussé les leaders des partis de l’opposition à l’exil. Ce ne sont pas les assos qui ont truqué les élections de 2010 non plus. Comment alors s’immiscent-ils des affaires politiques ? Je poserai la question à Edouard Nduwimana si je le rencontre un jour. 

Apres avoir décidé que les ces assos poursuivent des intérêts politiques (quels intérêts ?), le ministre les a prévenues qu’ils devront en « assumer les conséquences », et qu’ils ne devraient pas « être surpris s’il les traite différemment ». Qu’est-ce que cela veut dire ?
C’est-à-dire qu’il va les traiter comme il traite les partis politiques, ce qui revient à dire que ces activistes et leurs associations vont subir la répression que subissent les partis politiques de l’opposition. Il y a plusieurs scenarios. Il peut effacer les plus encombrants à ses yeux (Forsc, Parcem, Olucome, Focode, Aprodh, Ligue Iteka…) du moment où il ne les considère plus comme « apolitiques ».  Il peut les empêcher de se réunir comme il le fait avec les partis de l’opposition. Enfin, ils peuvent subir des menaces (ce qui est déjà le cas) jusqu'à jeter l’éponge et s’exiler, et dans les situations les plus radicales certains peuvent se faire assassiner par des malfaiteurs mystérieux que les enquêteurs ne trouveront jamais. N’est-ce pas ce qui est arrivé à beaucoup de militants des partis de l’opposition depuis 2010? Le pire n’est à exclure même si nous devons espérer le meilleur. Voila ce qui attend donc les associations les plus indociles de la société civile. 

La vraie menace contre les élections de 2015 et dont le Ministre de l’Intérieur ne semble pas se soucier, c’est la violence entretenue par certains agents de sécurité (ou d’insécurité) ou des renseignements et des milices des partis politiques dont la plus puissante est celle du parti au pouvoir CNDD-FDD, les fameux Imbonerakure. La vraie menace, c’est l’exclusion qui empêche les citoyens de jouir de leurs pleins droits. La vraie menace contre les élections de 2015, c’est la tricherie et  la falsification, pratiques courantes dans les républiques bananières. C’est de ces pratiques honteuses qu’il faut s’attaquer, au lieu de s’acharner sur des associations qui luttent pour la justice et la dignité humaine.

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