vendredi 5 juillet 2013

Mr Le Président, Qui A Mangé Notre Argent ?

Thierry Uwamahoro
par Thierry Uwamahoro
Dans son discours à la nation à la veille de la célébration du 51eme anniversaire de l’Independence du Burundi, Son Excellence Mr le Président Pierre Nkurunziza a regardé droit dans les caméras de la RTNB pour annoncer aux burundais et amis du Burundi que notre république a déjà recouvert 43% des aides promises à Genève, soit 1,200 milliards d’euro (ou l’équivalent de plus de deux mille milliards de Francs Burundais).

 Le Président s’est réjoui que le Burundi ait recouvert cette somme en moins de sept mois, alors que l’aide était supposée être échelonnée sur un période de 4 ans, une grande réussite pour le Burundi. Si le taux de recouvrement des aides avancé par Mr le Président est correct, de simples calculs nous amènent à conclure que dans les sept derniers mois, si ces aides étaient proportionnellement partagées entre ménages burundaises, chaque ménage aurait déjà reçu une somme estimée à 1,2 million de Francs burundais. Mr le Président, qui a mangé notre argent ?

Mr le Président, si le Burundi a déjà recouvert tant de milliards en sept mois, pourquoi alors étouffer ton peuple (et surtout 71% des enfants de moins de 5 ans qui souffrent de la malnutrition dans certaines provinces) avec des taxes sur le manioc, la farine de manioc, les grains de maïs et la farine qui en dérive, la farine panifiable, les poissons fumés (Indagala et Umukeke), les arachides, les haricots, les pommes de terre, le riz, les oignons et l’huile de palme ? Pourquoi avez-vous annulé la mesure de détaxation de ces produits d’alimentation de base ? 

Mr le Président, à moins que l’arithmétique ne soit ta bête noire,  comment expliquer cet acharnement contre un peuple affamé pour ne récupérer que 5 millions d’euro en taxes alors que vous avez pu recouvrir 1,200 milliards ? Si cette question est posée en termes de défaillance en arithmétique, c’est parce que l’alternative serait de supposer que vous  n’aimez pas votre peuple.

Mr le Président, avec 1,200 milliards d’euro pourquoi n’arrivez-vous pas à régler ces grèves répétitives des enseignants et  infirmiers qui ne réclament qu’être décemment  payés ? Pourquoi passez-vous par des intimidations ? Et d’ailleurs, des intimidations qui montrent combien vous êtes mal conseillé.

Certaines gens disent que vous avez de mauvais conseillers parce qu’ils vous laissent transformer les fêtes nationales hautement symboliques en journée nationale de décoration de la tribu restreinte Nkurunziza. Réellement, votre plus mauvais conseiller est la personne qui a glissé cette phrase dans ton discours du dimanche 30 juin : «Nous ne tolérerons plus ceux qui feront des grèves illégales. Du moment que ceux qui veulent du travail sont nombreux, Nous prendrons des mesures pour les remplacer sur le champ. » Mr le Président, rappeller aux burundais que 8 ans après votre règne ils sont nombreux à rester démunis et sans emplois, et le dire avec un ton qui sent fierté et arrogance de votre part, ne relève que de la cécité politique. Dans d’autres pays, les révolutions commencent justement parce que « ceux qui veulent du travail [et ne le trouvent pas] sont nombreux ». (Là c’est une parenthèse, revenons à notre argent).

Mr le Président, espérons que ce n’est pas pour des raisons propagandistes ou électoralistes que vous avez affirmé, tenant le peuple Burundais témoin, que 43% des promesses de Genève ont été recouverts. Entre vous et votre ministre des finances -- qui affirme que votre gouvernement vit une crise car rien n’a été débloqué (raisons pour laquelle vous nous taxer à nous suffoquer) -- il  y a un qui ne nous dit pas la vérité. Espérons que c’est votre ministre qui ne dit pas la vérité car il serait indigne de vous, Mr Président Pasteur, de transgresser le 8eme commandement le dimanche.  Et si c’est le ministre qui a tort, il faudra nous dire où est passé notre argent. Dans l’espérance que vous ne nous parlez pas de ces promesses qui n’engagent que ceux qui les reçoivent.
*Manger l’argent est une traduction littérale de « kurya amahera » qui signifie dépenser de l’argent, des fois d’autrui. 

1 commentaire:

  1. Ce Monsieur (économiste de formation) est décevant. Il montre les tares de beaucoup d'africains au grand jour. Ils ne vivent que le court terme. L'argent de Genève va servir à faire un travail structurel par rapport à notre économie. Ce n'est pas parce que vous avez reçu 1.2 Milliards USD que vous pouvez faire n'importe quoi. Il y a un cahier de charge. Chaque centime sert à une chose.
    Après des audits vont suivre pour savoir si le Burundi a utilisé l'argent correctement (c'est a dire comme cela était prévue avec les partenaires).
    M. Thierry il serait mieux que vous disiez ouvertement que vous regrettez l'époque de la Dictature.
    Le Burundi a des indicateurs économiques plus positifs que négatifs aujourd'hui. Le pays sait d'où il vient. DAM

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